Un cheval ne se moque pas
Il se fout de ta gueule !!!
Ou, dit plus joliment, « il se moque de toi ». Si on sait, ou si on a entendu, que « mais non, ils ne font pas cela », en sommes-nous pour autant convaincus ? Pas encore suffisamment.
« Se foutre de la gueule de »signifie, se comporter de manière dédaigneuse ou moqueuse. Et, non, le cheval n’a pas cette capacité. Il s’agit là de comportements complexes qui, même chez l’humain, sont encore sujets d’études tant il y a d’éléments qui entrent dans leur construction. Et pourtant, on l’entend toujours.
Pourquoi ?
Parce que c’est facile d’expliquer un comportement avec ça, et qu’on ne va pas chercher plus loin. Vous lui demandez de passer devant ce buisson, il refuse, il se moque de vous, parce que dans votre conception du monde, dans votre carte mentale d’humain, après tout ce n’est qu’un buisson et que refuser de passer devant ne peut-être qu’un acte intentionnel de ne pas vous écouter, de vous défier, de se moquer … what else ?
C’est la facilité qui nous maintient dans ce schéma. Parce que oui, il est facile d’interpréter, de juger des comportements, nous le faisons à chaque instant. Mais cette pensée automatique doit cesser.
Et pour cela il vous faut penser que « votre carte mentale » n’est pas celle de votre cheval !!! Votre monde est différent du sien :
– la vue : 340° pour lui, 190° pour nous. Vision panoramique donc mais peu nette. A l’inverse, quand les deux yeux regardent en même temps, c’est plus clair. Il ne distingue pas le rouge et le vert qui apparaissent gris, nous distinguons toutes les couleurs (sauf pathologies). Il voit bien dans le noir mais le temps d’accommodation entre ombre et lumière est lent. Nous avons des difficultés dans la pénombre.
– l’ouïe : les deux oreilles bougent indépendamment l’une de l’autre. Pas chez nous. Pour pallier une vue peu nette lorsqu’il broute, le cheval peut constituer une « image auditive » de son environnement. Il a développé une « écoute sélective », un peu comme les jeunes mamans qui sont capables d’entendre pleurer leu bébé alors même qu’elles sont dans une salle pleine de bruit. Ils sont capables de localiser précisément les sons. Leur champ auditif est différent de celui de l’homme. « Il perçoit les sons dont la fréquence se situe entre 55Hz et 33500Hz, alors que l’Homme entend les sons dans une fourchette de 16Hz à 20000Hz. Le cheval perçoit donc les ultrasons, inaudibles pour l’Homme, mais n’entend pas certains sons graves perçus par l’Homme. »
– l’odorat : les chevaux sont capables de sentir l’eau, même très loin, et vous ? Ses cellules olfactives sont extrêmement sensibles et il possède « l’organe de Jacobson, une petite lamelle cartilagineuse (très réduite, voire inexistante chez l’Homme) qui, selon les spécialistes en hippologie, fixe les odeurs pour mieux les analyser. »
Il ne s’agit là que de quelques exemples pour vous faire comprendre que nos mondes sont différents.
Ainsi, s’il ne veut pas passer devant ce buisson, c’est à vous de faire l’effort (excusez ce vilain mot) de comprendre qu’il a une raison. Dans son monde, dans sa carte, ce buisson est un problème.
En fait c’est même le maître mot quand on se veut homme ou femme de cheval : comprendre. Mais pas avec votre carte à vous ou avec vos schémas mentaux à vous, avec son monde à lui.
La question quand une difficulté se pose serait plutôt « comment l’aider ou comment me faire comprendre mieux que cela ? »
Et oui, vous voyez que cela suppose quoi ? De l’humilité et de l’ouverture pour accueillir l’autre dans sa diversité.
Reconnaître que l’on n’a pas été assez clair, que l’on a encore des choses à apprendre soi-même et à apprendre à son cheval, que l’on s’est trompé, n’est pas quelque chose à fuir mais une opportunité.
Quand vous pensez « il se moque de moi » switchez votre pensée avec « ok, j’ai ce problème à régler ». « J’ai », « Moi », « Je », parce que c’est vous qui avez cette responsabilité.
Sources :